des réponses à vos questions sur...

Les attributions et circonstances exceptionnelles du Conseil municipal

Le principe fondamental qui régit les compétences du Conseil Municipal est celui de la compétence générale, énoncé à l’article L. 2121-29 du Code général des collectivités territoriales. Ce principe signifie que le Conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune et habilite l’assemblée à statuer sur toutes les questions d’intérêt public communal.

La clause générale de compétence est la traduction complète du principe de libre administration des collectivités territoriales par des conseils élu·es, prévu par la Constitution. Elle habilite le Conseil municipal à intervenir sur toute question d’intérêt public communal, mais elle rencontre deux limites principales :

  1. Les questions ne doivent pas être dévolues par la loi à l’État ou à d’autres personnes publiques.
  2. Il ne doit pas y avoir d’empiètement sur les attributions conférées au maire, comme celles où le maire agit en tant qu’agent de l’État.

Oui, sans sortir de ses attributions, le Conseil municipal est habilité à délibérer valablement sur toute question relative au fonctionnement d’un service municipal. Cela inclut des décisions concernant la création ou la suppression d’un tel service, ainsi que ses règles générales d’organisation. De manière générale, il peut prendre toutes les mesures portant sur la politique générale de la commune.

Le principe de compétence générale du Conseil municipal est limité par le champ d’intervention d’autres autorités, notamment les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Dès lors qu’une commune a transféré sa compétence à une intercommunalité (par exemple pour l’assainissement ou l’enlèvement des ordures ménagères), le Conseil Municipal ne peut plus délibérer légalement dans ce domaine.

Le juge de l’excès de pouvoir est chargé de vérifier que l’exercice de la compétence générale par le Conseil municipal répond bien à un but d’intérêt général. Il s’assure également que la délibération n’est pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et qu’elle respecte les limites imposées par la loi.

Bien que le Conseil Municipal ait la compétence générale de régler « les affaires de la commune », cette compétence n’est pas illimitée. La limite principale est la notion d’intérêt communal. Les interventions de la commune doivent avoir pour objet direct de répondre aux besoins de sa population, et doivent se rattacher à un intérêt public communal.

Oui, le Conseil Municipal n’a pas l’interdiction de délibérer sur une question d’intérêt national ou européen. Toutefois, la jurisprudence exige que cette question ait un rapport direct avec l’intérêt local. Par exemple, une délibération d’une commune sur l’élargissement de l’Union européenne sans lien avéré avec son territoire ne serait pas jugée d’intérêt communal.

Le juge administratif veille au respect de deux exigences essentielles :

  1. Les interventions de la commune doivent répondre aux besoins de la population (besoins économiques, culturels, sociaux, etc.), appréciés de manière large.
  2. Elles doivent respecter le principe de neutralité des services publics, notamment en s’assurant qu’elles ne portent pas gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics. Le juge vérifie que l’acte n’est pas entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.

Si une délibération est considérée comme portant gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics, le préfet dispose de la possibilité de la déférer au juge administratif pour en demander la suspension. Le gestionnaire d’un service public, lors de la définition de ses règles, doit toujours veiller au respect de la neutralité du service et à l’égalité de traitement des usager·ères.

Oui, le Conseil Municipal doit donner son avis toutes les fois que les lois et règlements l’exigent ou lorsque cet avis est demandé par le préfet. Si, après avoir été régulièrement requis et convoqué, le Conseil Municipal refuse ou néglige de donner son avis, les autorités compétentes peuvent passer outre à la consultation sans que la procédure en soit viciée. Le refus délibéré de donner un avis est assimilé à une formalité satisfaite.

Le Conseil Municipal est autorisé à émettre des vœux sur tous les objets d’intérêt local. Cette faculté permet à l’assemblée de manifester publiquement son opinion et ses préoccupations, notamment sur la politique générale du gouvernement, mais uniquement si ce vœu a un lien direct et avéré avec les intérêts de la commune et les besoins de sa population.

Un vœu est une simple prise de position qui ne produit aucun effet juridique et ne saurait se substituer à une décision ou à un acte de gestion. Il devient une délibération illégale s’il sort du champ de l’intérêt communal pour aborder des questions purement nationales ou internationales sans lien avec la commune, ou s’il contrevient au principe de neutralité des services publics. L’adoption d’un vœu illégal peut d’ailleurs faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

Oui, le Conseil Municipal a la possibilité de décerner des hommages publics, qui peuvent prendre la forme de titres honorifiques comme celui de citoyen·ne d’honneur ou la dénomination de voies et de places. Toutefois, ces hommages doivent également répondre à un intérêt communal. Une délibération décernant la citoyenneté d’honneur qui relève d’un engagement militant dans un conflit international sans intérêt local particulier est considérée comme nulle, car elle méconnaît le principe de neutralité.

Oui, une délibération attribuant la qualité de citoyen·ne d’honneur ou décidant d’un hommage public est un acte qui a le caractère d’un hommage public et est donc susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif. Le juge exerce un contrôle, même restreint, pour vérifier que ces dénominations ou hommages répondent bien à un intérêt communal et respectent les principes constitutionnels.

La différence principale réside dans la portée de l’avis citoyen. Dans le cas de la consultation des électeur·ices (article L. 1112-15 du CGCT), la population donne un simple avis qui ne lie pas l’autorité publique, et la décision finale appartient aux organes de la collectivité. Le référendum communal (article LO 1112-1 du CGCT), en revanche, permet aux habitant·es de décider sur la question qui leur a été soumise, se substituant ainsi à la décision de leurs représentant·es.

Oui, l’article 72-1 de la Constitution prévoit que la loi fixe les conditions selon lesquelles les électeur·ices de chaque collectivité peuvent, par l’exercice du droit de pétition, demander l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante d’une question relevant de sa compétence.

La consultation et le référendum local doivent obligatoirement porter sur une question relevant de la compétence du conseil municipal. Cela empêche d’utiliser ces procédures pour :

  • Des sujets relevant de la compétence d’autres autorités, comme le devenir d’un hôpital.
  • Des questions de nature constitutionnelle ou nationale (par exemple, le droit de vote des étranger·ères non communautaires).
  • Des projets d’actes individuels, car ceux-ci relèvent de la seule compétence de l’exécutif (le maire).

L’article 72-1 de la Constitution encadre ces mécanismes en permettant à la loi organique de fixer les conditions selon lesquelles les projets de délibération ou d’acte relevant de la compétence d’une collectivité territoriale peuvent être soumis par la voie du référendum à la décision des électeur·ices. Il prévoit également le droit de pétition pour demander l’inscription d’une question à l’ordre du jour.

Non, une commune ne peut pas légalement instaurer de procédure qui obligerait le conseil municipal à inscrire une affaire à son ordre du jour à la demande d’une partie des habitant·es, puis à faire intervenir un vote des habitant·es pour la mise en œuvre de cette proposition en cas de rejet par le conseil municipal. De telles tentatives de procédure seraient considérées comme illégales.

La dissolution d’un conseil municipal est prononcée par décret du Président de la République pris en Conseil des ministres et publié au Journal officiel. C’est une mesure qui doit rester tout à fait exceptionnelle. Elle ne peut être légalement motivée que par la nécessité d’assurer le fonctionnement de l’assemblée ou si le conseil est hors d’état de gérer les affaires de la commune (CGCT art. L. 2121-6).

La dissolution est une mesure solennelle, prise par décret en Conseil des ministres. La suspension, en revanche, est une mesure provisoire et plus souple prise par le préfet en cas d’urgence. La durée de la suspension ne peut excéder un mois.

En cas de dissolution du conseil municipal, de démission de tous ses membres, ou d’annulation définitive de l’élection de tous ses membres, une délégation spéciale est nommée pour en remplir les fonctions (CGCT, art. L. 2121-35).

Ses pouvoirs sont limités aux actes de pure administration conservatoire et urgente. La délégation spéciale ne peut, par exemple, ni préparer le budget communal, ni recevoir les comptes du maire ou du receveur, ni modifier le personnel ou le régime de l’enseignement public (CGCT, art. L. 2121-38). Les actes qu’elle adopte doivent avoir pour objet unique d’assurer la continuité des services publics et de préparer le scrutin de manière impartiale.

L’état d’urgence sanitaire est un dispositif instauré par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à une catastrophe sanitaire. Dans ce contexte, des textes (comme l’ordonnance n° 2020-330 du 25 mars 2020) ont été pris pour apporter des souplesses aux collectivités, notamment en reportant les dates limites d’adoption de décisions budgétaires (comme le budget primitif reporté au 31 juillet 2020).

Pendant l’état d’urgence sanitaire, des mesures dérogatoires ont été mises en place pour assurer la continuité démocratique et la sécurité sanitaire. Elles ont notamment permis :

  • La tenue de réunions à huis clos.
  • La fixation du quorum au tiers des membres en exercice.

 

Le maire ou la présidente d’un Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) a pu recevoir une délégation spéciale de l’organe délibérant. Cette délégation permettait notamment d’exercer des compétences visant à ajuster les montants et affectations d’aides et subventions, ou de délibérer sur des garanties d’emprunt ou des opérations de trésorerie.

Le mécanisme permettant de déclarer la mobilisation générale en France est prévu par le Code de la Défense, qui est mis en œuvre après une décision au plus haut niveau de l’État.

En droit français, l’instauration d’un état de guerre ou d’un régime d’exception (comme la mobilisation générale qui en est une composante) est encadrée par :

  • Le Président de la République et le Conseil des Ministres : La décision de décréter la mobilisation générale est prise par le Président de la République en Conseil des ministres. Elle est autorisée par une loi ou intervient dans le cadre d’une loi de programmation militaire, conformément aux dispositions du Code de la Défense (articles L1111-1 et suivants).
  • Le Parlement : Une loi est nécessaire pour autoriser ou fixer le cadre de la mise en œuvre de la mobilisation.

 

La mobilisation générale est l’ensemble des mesures (humaines, matérielles, économiques) destinées à placer la Nation en état de défense pour répondre à une agression

Le CGCT encadre l’adaptation du Conseil municipal à la mobilisation aux articles 2124-1 et 2124-2. Ces règles visent principalement à assouplir les conditions de validité des délibérations lorsque des membres sont mobilisés :

  • Quorum réduit : Le conseil municipal peut délibérer valablement après une seule convocation, à condition que la moitié de ses membres non mobilisés soient présents à la séance.
  • Contrôle préfectoral accru : Si le conseil est réduit à moins d’un tiers de ses membres en exercice du fait de la mobilisation, les délibérations ne sont exécutoires que si le Préfet n’en a pas suspendu l’exécution par une décision motivée dans un délai d’un mois.
  • Délégation spéciale : Si les élections au conseil municipal ont été ajournées, une délégation spéciale est habilitée à prendre les mêmes décisions que le conseil.

Le CGCT encadre l’adaptation du Conseil municipal à la mobilisation aux articles 2124-3 à 2124-7. Ces dispositions prévoient des mesures plus radicales pour assurer la continuité de l’administration :

  • Suspension des élus : Tout membre du conseil municipal, y compris le maire, peut être suspendu par décret (pris sur proposition du ministre de l’Intérieur) pour des motifs d’ordre public ou d’intérêt général, et ce jusqu’à la cessation des hostilités.
  • Remplacement du Maire : En cas d’absence, suspension, révocation ou autre empêchement du maire, le Préfetpeut désigner un délégué (choisi parmi les conseillers municipaux) pour le remplacer dans la plénitude de ses fonctions.
  • Suspension du Conseil Municipal : Le conseil municipal (ou l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale) peut lui-même être suspendu par décret. Ce décret institue alors une délégation spéciale qui est habilitée à prendre les mêmes décisions que l’assemblée communale.

 

Il est important de noter que lorsque la délégation spéciale est instituée spécifiquement dans le contexte de la mobilisation ou du temps de guerre, ses pouvoirs sont étendus à la prise de toutes les décisions de l’assemblée, par dérogation à la règle générale qui limite habituellement les pouvoirs de la délégation spéciale aux seuls actes de pure administration conservatoire et urgente.